Semelles de vent

LE GHANA, Mars 2012

Ca faisait longtemps que je devais rendre visite à mon frère Jacques au Togo, lui qui était venu me voir en 2010 à Damas. Il habite là-bas la moitié de l’année, à Kpalimé au pied des montagnes, à 120 km de Lomé.

Départ le 16 mars de Paris pour Accra via Bruxelles. Arrivé en fin d’après midi, Jacques, son copain de toujours Charles et Roger le chauffeur-cuisinier (dit “Cho-cu”), m’attendent à l’aéroport, et nous roulons de nuit jusqu’à la maison de Charles dans la banlieue. A peine arrivé j’ai dû quitter mon pull et ma veste, la température étant de 30-32° et très humide. Transpiration assurée.

Les villes ici ne se construisent pas en hauteur, mais s’étendent maison après maison dans la savane environnante, et donnent ainsi l’impression d’une banlieue qui n’en finit pas. Aussi, à part les avenues principales, trouve-t-on beaucoup de rues encore en terre battue, plutôt défoncées, et des arbres un peu partout.

Accueil très sympathique chez Charles. Roger nous prépare un bon dîner. Nuit de repos sous le ventilateur du plafond, avec des grilles anti-moustiques à toutes les fenêtres.

Le lendemain, départ pour le village de Charles. Route longue et droite vers l’est, nous traversons des villages avec beaucoup d’animation de chaque côté de la route. A droite et à gauche, immenses étendues de la savane parsemées de quelques troupeaux de buffles. Le village se situe non loin de la frontière togolaise sur la mangrove, ces marais que l’on trouve en bord de mer dans les pays tropicaux.

Puis nous bifurquons à droite sur une route de terre ocre; à 2km du village nous nous arrêtons entre deux auvents de palmes qui abritent deux fétiches. Jacques et Charles me racontent que la coutume veut que tout nouveau venu est tenu d’abord de danser face à chacun de ces deux fétiches avant de rentrer dans le village. Je m’exécute bien sûr, alors je les entends éclater de rire, ce sont eux qui ont inventé cette coutume pour les amis de passage! N’importe, cérémonie réussie.

Le village : des maisons avec cours, entourées de murs, au milieu d’arbres de toutes sortes, cocotiers, manguiers, badamiers, palétuviers... Quelques chaises sous l’un d’eux et nous commençons la... palabre! L’arbre à palabre est toujours bien vivant! Mais avec cette chaleur moite, le café du coin avec ses bières fraiches est aussi bien apprécié, et nous observons tous ces gens qui passent, portant presque toujours quelque chose sur la tête (surtout les femmes). 

Puis nous allons visiter le marché aux poissons, petit marché local,  où l’on vend surtout des petits poissons à frire, pêchés dans les marais de la mangrove. Couleurs et animation!

Ensuite nous nous dirigeons vers la mer, et nous arrivons sur d’immenses marais halophiles, c’est à dire qu’ils sont plein de sel, qu’on pourait aussi appeler des marais salants. Ces marais sont coupés de la mer par une barre de sable, et ce n’est donc pas le sel de la mer qui est récolté. Tas de sel à l’infini, et tout un peuple qui s’active, qui récoltant, qui transportant la matière précieuse, panorama grandiose.

Une route de terre traverse la lagune et nous mène enfin à la mer, l’océan, devant lequel on s’arrête toujours ébahi. Petite pose de contemplation! Malheureusement la barre de sable qui protège les marais s’amenuise petit à petit au fil des années, une route qui la longeait a déjà été complètement détruite. 

Au retour nous nous arrêtons chez Marshal, prêtre fétichiste grand ami de Jacques; jeune, souriant, en panta-courts et en teeshirt, il a pris avec son frère, lui aussi prêtre fétichiste, la succession de leur père. Nous l’emmenons au café pour arroser ça.

Le lendemain dimanche j’ai l’occasion d’observer un jeune garçon qui tisse des longues bandes de tissu coloré, qui, une fois assemblées par 12 ou 24, donneront de merveilleux pagnes. Découverte, dans un tout petit café près de la maison de Charles, d’une boisson locale pas dégueu, l’Herb-Afric, alcool fait avec des herbes dans lequel on ajoute un peu de sirop de citron.

Puis dans l’après-midi retour à Accra, son labyrinthe de routes, rues et ruelles, ses embouteillages...

Lundi, c’est la corvée : un visa pour moi à l’ambassade du Togo, et mon billet de retour Accra-Le Caire-Damas pour le 31.

Et le mardi... en route pour le Togo, Kpalimé où il me tarde d’arriver pour enfin connaître la maison de Jacques, son Rayat.

 

Savane

 

Savane, savane

Mon coeur tropical

Tes rumeurs s’envolent

Sous l’arbre à palabre

 

Mer d’herbes et d’arbres

Des troupeaux de buffles

Font ta calme écume

Au soleil des palmes

 

La fuite du temps

Se perd dans tes ondes

Que le vent frissonne

Jusqu’aux horizons

 

Quand le vent se tait

Dans la langueur moite

D’un village écrin

Au bord des mangroves

 

Les fétiches dorment

Ciel gris plomb, gris d’eau

Sol rouge oxydé

Aux termites mornes

 

Ô Guinée de sel

Tes palétuviers

Tes prêtres sorciers

Qui nous ensorcellent

 

Savane, savane

Forêts aruspices

Poissons qui boucanent

Soie de haute lice

 

Savane, savane

Mon coeur tropical

S’est épris de toi

Parade nuptiale.

 



12/04/2012
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